Antiqu'idées
4° de couverture
Après Histoires d’aulx, U-chroniques, Riposte Apo, Total Chaos, Rétro-fictions et Star Ouest, l’association imaJn’ère vous propose une nouvelle anthologie thématique !
Réalisée à l’occasion du sixième salon ImaJn’ère, le salon de la Science-Fiction et du Policier d’Angers où de plus en de plus d’auteurs de l’imaginaire francophone se réunissent chaque année, l’anthologie Antiqu’idées explore tous les aspects bien connus de l’Antiquité, par le biais de la science-fiction, de la fantasy, du fantastique et d’une pointe de polar.
Que pouvons-nous trouver comme idées neuves en refouillant l’Antiquité ? Revisiter un passé déjà connu, imaginer un futur plus rose ou tout simplement plonger dans l’Histoire antique pour le plaisir des yeux et des sens, voilà le programme d’Antiqu’idées. Quinze auteurs ont imaginé des histoires originales mettant en scène des éléments ou des personnages antiques, pour bousculer nos connaissances et rappeler que l’Histoire peut être vue autrement, voire même revécue.
De la Guerre de Troie à la Cimmérie, en passant par l’Égypte, Carthage et les confins bien connus de notre héritage gréco-latin, ces quinze nouvelles s’attachent à nous conter gaiement notre besoin de combat épique, de voyage au lointain et de quête de nos racines.
Notre avis
L'avis de Siana :
Antiqu’idées, l’anthologie officielle du Festival ImaJn’ère 2016, pique d’emblée la curiosité. Le thème, certes souvent exploité dans les genres de l’imaginaire, ne manque cependant guère de potentiel. Je craignais un peu une surreprésentation de l’antiquité gréco-latine dans ces nouvelles, mais ai été agréablement surprise par la variété des textes.
Qui plus est, on trouve au sommaire autant d’auteurs connus dans le milieu SFFF que de petits nouveaux. Il est toujours plaisant de découvrir de nouvelles plumes, mais aussi de voir comment des auteurs qu’on apprécie exploitent un thème donné.
Comme pour toute anthologie, il est assez difficile d’évoquer les textes sans trop en dire. En outre, ils couvrent un grand éventail de lieux et de genres, j’ai donc décidé de les présenter dans l’ordre de publication.
L’anthologie s’ouvre sur La Maison des vignes d’Estelle Faye. Une nouvelle Fantastique dans la plus pure tradition du genre. L’auteur a choisi d’effleurer les Mystères dionysiaques, thème cher à mon cœur, et est parvenue à créer une ambiance très plaisante. Le soleil, le vin, des éblouissements qui altèrent la raison… J’ai néanmoins trouvé l’intrigue un peu convenue. Cependant, il s’agit d’un très bon texte.
Ensuite vient Rivages d’Eva Simonin, un texte agréable, mais à la chute prévisible. Le fond mythique n’y est pas assez exploité à mon goût. Il y avait matière à le rendre moins anecdotique.
Deux fois vainqueur traverser l’Achéron de Fabien Clavel est indubitablement mon texte préféré.
Eurydice nous y chante ses presque retrouvailles avec Orphée. L’auteur a une parfaite connaissance du mythe et a su en exploiter le moindre détail avec intelligence et finesse, tout en peuplant les zones d’ombre de nouveaux fantômes (ou d’autres créatures moins ragoûtantes). Cette lecture entre les lignes est originale et en même temps très respectueuse. J’ai, de même, beaucoup apprécié la référence à Nerval.
Le rêve du pont Milvius est également un très bon texte. Il mériterait largement d’être développé sous forme romanesque. Dans ce monde, l’islam s’est imposée à la place du christianisme et un écrivain moderne se demande ce qui se serait produit si cela n’avait pas été le cas. Cette mise en abyme uchronique, rappelant un peu Le Maître du Haut Château de K. Dick, est très intéressante.
Ponce, Pilate, ponce ! de Justin Hurle nous fait changer de registre. Les plaies d’Égypte y ont une origine pour le moins loufoque. Ce texte amusant et déjanté me rappelle quelque chose sans que je sache dire exactement quoi. Il est néanmoins original et apporte un peu de légèreté à cette anthologie, tout en changeant de décor. Néanmoins, ce type d’humour ne séduira pas tout le monde.
Je pense être passée totalement à côté du texte suivant… Je ne saurais pas dire pourquoi, mais je n’ai pas du tout accroché au récit de Brice Tarvel, Le Tombeau de Calypso. C’est pourtant du Fantastique, mon genre préféré. Un Ulysse déboussolé y échoue sur une île d’Ogygie bien loin de ses standards…
Chez Lucius, Dieux, Lares et Génies de Myrtille Bastard démarrait plutôt bien. L’idée de base ne manquait pas de piquant : toi aussi chez toi crée une divinité qui exaucera tes vœux puisque les autres ne le font pas ! Info ou intox ? Le narrateur, stéréotypé à souhait, était idéal pour ce genre de récit. Cette nouvelle avait du potentiel. Malheureusement, celui-ci n’est que peu exploité, tout comme le filigrane uchronique qu’on entrevoit à peine. La fin m’a semblé décevante, peut-être un peu lisse pour la cynique que je suis.
Âheli ou la mémoire enfuie est un récit plus doux. Cette vision de l’Atlantide et de sa fin n’est pas très originale, il me semble avoir lu mille fois une interprétation de ce type, mais celle-ci se révèle néanmoins efficace et élégante dans sa simplicité. En tout cas, j’en ai apprécié la lecture.
Quid Novi Medice nous emmène au temps de la guerre des Gaules (référence obligatoire à deux célèbres Gaulois) et explore à sa façon le thème très couru des super-héros.
Carthage ! d’Arnaud Cuidet fait partie des textes qui m’ont le plus marquée. Cela est d’autant plus étonnant que je ne suis pas férue de scènes de combat. Toutefois, le mélange entre science-fiction, histoire et références littéraires (un des rares textes de Flaubert qui me parle vraiment) m’a beaucoup plu. J’ai de surcroît trouvé le style de l’auteur très poétique et agréable à lire.
Boadicée, comme son titre l’indique, nous emmène sur les traces de la célèbre reine guerrière, mais quel destin choisirait-elle s’il lui était donné d’entrevoir son futur ? L’auteur y fait montre d’un sens de la mise en scène plutôt intéressant.
Discorde mêle SF et mythologie grecque de façon relativement amusante. On y rencontre trois donzelles qui cherchent un gugusse pour les départager et un berger d’origine princière, si ça vous parle… Cette réécriture était plutôt sympathique, j’ai beaucoup apprécié le début mais ai été une nouvelle fois déçue par la fin.
Une Histoire Tauride est l’une des nouvelles que j’ai le plus appréciées. Un scientifique endetté s’embarque dans un chantier de fouilles archéologiques qui se révèle particulièrement atypique. Quand l’Histoire se réécrit d’elle-même (ou presque, merci les incidents nucléaires) pour intégrer de la fiction (cimmérienne, mes amis !) et que des chats patriotes s’en mêlent, moi je dis que ça vaut le détour ! J’en aurais bien lu quelques pages de plus.
Un contrebandier, une chèvre et un chevalier sont dans une barque… Ça commence comme une blague et on n’est pas loin du compte. L’Immortel et l’Assassin est un texte récréatif, qui joue sans vergogne sur le mélange des genres et des références très marquées à une obscure saga interstellaire et ses sabres lasers… De quoi passer un bon moment.
Je connaissais déjà Faisabilité et intérêt zootechniques de la métamorphose de masse et je l’ai relu avec plaisir. Ce texte, rédigé comme une étude des plus sérieuses, est à la fois drôle et intelligent. On nous y propose de régler le problème de la surpopulation et du manque de ressources nourricières grâce à un épisode de l’Odyssée. Sous couvert d’humour et de métaphore, il aborde des problèmes réels, des points de morale et d’éthique, et offre une réflexion intéressante.
Dans l’ensemble, je garde une assez bonne impression de cette anthologie qui respecte le pari de nous faire voyager dans le passé et propose un panel de textes très éclectique. Certains m’ont peu marquée, il est vrai, mais se détachent du lot de vrais petits bijoux qui satisferont les lecteurs les plus exigeants et resteront dans les mémoires.